Sujet intéressant et ô combien compliqué et sujet à polémique : le résultat des études dépend souvent de qui les finance. Les partisans du thermique montreront à juste titre les progrès réalisés (sur les polluants mesurés et dans des conditions définies) ces dernières années et la moindre émissivité des processus de fabrication des automobiles actuelles. A contrario, les partisans de l'électrification plaideront pour les faibles émissions directes, mais le bilan "du puit à la roue" reste difficile à établir tant il dépend de nombreuses variables.
Je rejoins tout à fait Steph31 sur le meilleur bilan global en terme d'émission pour la production d'électricité avec des processus continus. Notre moteur thermique doit fonctionner à des températures des plus froides au plus chaudes, du ralenti à la zone rouge, de l'absence de charge à la pleine charge : impossible de dépolluer des situations aussi variées pour un coût acceptable.
Boosté par le Diesel Gate
dont VW a été le triste leader, les constructeurs ont mis le paquet pour laver plus blanc que blanc en matière de diesel avec l'entrée en vigueur de nouvelles normes de dépollution (les dates mentionnées correspondent à le première immatriculation, pour l'homologation d'un nouveau véhicule elle est avancée) :
- euro 6c (depuis Septembre 2018) : les véhicules sont testés avec le cycle WLTP (au lieu de l'antique cycle NEDC), plus représentatif des conditions de fonctionnement réel, mais toujours réalisé sur banc à rouleau. Pour les « essence », le niveau d'émission des particules est ramené enfin au niveau des diesel (d'où la disparition du T6 essence, dont les volumes étaient certainement trop faibles pour justifier le développement et l'industrialisation d'une solution avec un filtre à particules).
- euro 6d-temp (à partir de Septembre 2019) : ajout d'un cycle de test en conditions réelles de roulage (RDE : Real Driving Emission test). Lors de ce cycle encore plus proche des conditions d'utilisation réelles, il sera toléré d'avoir des émissions supérieures à la norme : 110% pour les NOx et 50% pour le nombre de particules. C'est une étape "temporaire", d'où le nom "temp".
- euro 6d (à partir de Janvier 2021): dans le cycle RDE, les émissions réelles ne doivent pas dépasser la norme de plus de 50% pour les NOx et le nombre de particules.
Alors en 2021, les nouveaux véhicules pourront-ils être considérés comme "propres" ? Ben non
, la dépollution est une quête sans fin, car il reste encore pas mal de sujets, même si les progrès réalisés sont déjà importants :
- particules fines et ultrafines : même si elles sont moins nombreuses en quantité en en masse, ce sont justement les plus fines qui sont soupçonnées d'être les plus nocives. Là ce sont les moteurs à essence qui sont à priori les plus mauvais (sur véhicules testés en euro 6d-temp).
- NOx : si les progrès réalisés sur le diesel sont indéniables, avec la généralisation du SCR (injection d'AdBlue à l'échappement) et l'augmentation des quantités injectées. Cependant, l'urée se décompose en CO2 et en ammoniac (NH3). Le dosage parfait de l'injection d'urée est impossible à réaliser : dosé en trop petite quantité, il restera des NOx à l'échappement. Dosé en trop grande quantité, il restera de l'ammoniac à l'échappement. Combiné au NO2 de l'air et à de la vapeur d'eau, il se transforme en... particules (on parle alors de particules secondaires, car elle ne seront pas mesurées à l'échappement, mais par les stations de surveillance de la qualité de l'air. Bref, ce ne sera pas la priorité des constructeurs, tant qu'il n'y aura pas de mesure ou de norme sur les émissions d'ammoniac.
Bien entendu, l'émission de gaz à effet de serre est aussi préoccupante, puisqu'elle est en partie responsable du réchauffement climatique.
- CO2: là, il n'y a pas photo, un diesel est meilleur qu'un essence.
- Autres causes : même en fonctionnement dans de bonnes conditions de température, les moteurs à combustion, et en particulier avec le système SCR (diesel), émettrait aussi du protoxyde d'azote (N2O). L'inconvénient est que son potentiel de réchauffement global (PRG) est de 300. En clair, un moteur qui émettrait seulement 0,5g/km (c'est-à-dire presque rien) émettrait l'équivalent de 150g/km de CO2. A ma connaissance, l'émission de N2O n'apparait pas dans la liste des émissions mesurées sur les véhicules : en route pour le prochain scandale ?
Pour solutionner ces problèmes, il y a deux voies :
- l'escalade technologique avec des systèmes toujours plus complexes, mais qui apportent à chaque fois un progrès, parfois au prix d'autres inconvénients.
- modifier notre comportement : on en arrive donc à la même conclusion que Hippo29 : c'est à l'arrêt qu'un moteur est le moins émissif... Ceci sous-entend alors des concessions sur notre mode de vie.
La difficulté est d'arriver à concilier les deux types de solutions, qui sont souvent contradictoires. Pour l'illustrer, je peux faire mon propre mea culpa : j'ai un magnifique California (2,6 tonnes de technologie), mais j'aspire à émettre moins de polluants et de gaz à effet de serre ! Il y a 30 ans, j'ai passé plusieurs fois mes vacances à travers la France à vélo avec une tente sur le porte-bagage. C'était moins confortable et je ne suis pas sûr de le refaire maintenant, mais cela reste un excellent souvenir et était assurément moins émissif